La lettre de Jeff
Une approche plus efficace pour réduire les émissions de carbone et la facture énergétique. Des murs plus épais ne permettent pas de réaliser des économies d’énergie significatives !
Jeff Hood, Vice Président, Ventes Internationales, Icynene Inc.
Lorsque nous avons fondé Icynene en 1986 à Toronto et démarré la commercialisation de notre mousse isolante sans gaz d’expansion, le terme « vert » se référait à une couleur, pas à un mouvement écologique. Nous étions des pionniers à une époque où les coûts énergétiques étaient encore relativement bas et la prise de conscience publique sur les gaz à effet de serre presque inexistante. Peu de personnes comprenaient nos arguments visant à réduire les infiltrations d’air dans les bâtiments pour diminuer la facture énergétique, limiter la condensation qui se forme lorsque l’air humide infiltré est au contact de parois froides, créant ainsi un support « idéal » pour la formation de moisissures. C’est seulement depuis le printemps 2008, 22 ans après le lancement d’Icynene, que la France impose un test d’étanchéité à l’air dans les bâtiments BBC-effinergie. Malgré ces obstacles et le conservatisme du monde du bâtiment, nous avons persévéré dans nos démarches et aujourd’hui notre mousse isolante écologique, est distribuée dans 31 pays avec plus de 300 000 bâtiments isolés dont trois des dix bâtiments les plus écologiques des Etats-Unis, qualifiés par le Comité sur l’Environnement de l’American Institute of Architects (équivalent à l’Ordre des Architectes en France).
Nous distribuons Icynene en Europe depuis quelques années et la valeur « U » des murs (reflétant entre autre le lambda ou la conductivité de l’isolant) est la première mesure prise en compte dans la législation, alors que l’on ferait mieux de se soucier de la performance énergétique globale du bâti. L’Europe semble donc se focaliser sur une valeur de murs U qui, diminuée, impliquera la conception de structures avec une épaisseur d’isolant de plus en plus importante. D’après nous, ce n’est pas la solution. Les canadiens étudient la performance énergétique d’un bâtiment en considérant celui-ci comme un système interactif à part entière. Icynene a été développé dans cet esprit.
En fait, la valeur U des murs ne mesure qu’un seul type de transfert d’énergie car elle se réfère seulement à la conduction thermique alors que d’autres flux thermiques doivent être maîtrisés pour optimiser la consommation d’énergie :
La convection fait monter l’air chaud et si celui-ci est chargé d’humidité il transportera de la vapeur d’eau qui déplace le chaud vers les zones plus froides et moins humides (effet buvard).
Lorsque par exemple, il fait froid et humide à l’extérieur, l’humidité est invariablement attirée vers l’intérieur qui est plus chaud et sec. Ce transfert d’humidité va donc contribuer au refroidissement du bâtiment et plus l’air est humide, plus il va refroidir les murs sur son passage. Un air humide peut donc transporter beaucoup plus d’énergie – froide ou chaude – qu’un air sec. L’effet thermique s’inverse dans un climat chaud et humide où l’air humide aura tendance à pénétrer à l’intérieur du bâtiment pour le réchauffer. Le chaud se déplace donc vers le froid et l’humide vers le sec.
D’autre part, l’épaisseur de l’isolant a ses limites et son efficacité atteint un plateau très rapidement au delà d’une certaine épaisseur. Ce phénomène est le même pour tous les isolants:
Dans l’exemple ci-dessus, le transfert d’énergie est mesuré pour un isolant en fonction de son épaisseur afin de vérifier la validité de la deuxième Loi Thermodynamique de Fourier (1807). Avec une épaisseur de 125 mm on atteint une efficacité de 95%, si l’on double l’épaisseur d’isolant à 250 mm, le gain en efficacité n’est que de 3% ! C’est la raison pour laquelle l’amélioration de l’efficacité énergétique passe par une étude globale du bâtiment qui doit prendre en compte de nombreux autres facteurs tels que la convection, le rayonnement, le transfert d’humidité, les ponts thermiques et surtout l’étanchéité à l’air du bâti. Malheureusement, quelques entreprises peu scrupuleuses vont préconiser l’installation d’un excès d’isolant, histoire d’accroitre leurs bénéfices.
La réduction des gaz à effet de serre passe par une optimisation de nos ressources. Augmenter l’épaisseur des murs de manière inconsidérée, non seulement n’est pas écologique, mais entraîne l’augmentation des coûts de construction et une diminution de la surface habitable. Pendant de nombreuses années, l’importance de l’étanchéité à l’air n’a été ni soulevée ni prise en considération car nos modes constructifs (briques de parpaing, plaques de béton…) ne permettaient pas d’assurer cette étanchéité, sauf en augmentant les coûts de construction de façon prohibitive. Le problème est à nouveau aujourd’hui soulevé car la nouvelle réglementation thermique BBC limitera dès 2012 la consommation à 50 kW/h/m2/an. Imposer une valeur U inférieure pour les murs n’est pas la solution, car nous savons qu’une épaisseur d’isolant d’environ 140 mm est suffisante dans la majorité des cas – c’est ce qu’utilisent les québecois qui subissent des hivers à -35 °C pour isoler leurs maisons. Une très bonne étanchéité à l’air, inférieure à 0.6 m3/m2/h permettra par contre de réaliser en plus des économies d’énergie substantielles, jusqu’à 50%.
Aujourd’hui, les produits d’isolation augmentant le plus leurs parts de marché dans le monde sont les mousses souples expansives projetées. Celles-ci permettent en effet d’optimiser l’isolation avec un minimum d’épaisseur tout en assurant une bonne étanchéité à l’air. Ces systèmes d’isolation sont parfaits pour réaliser des bâtiments plus sains tout en limitant notre impact sur l’environnement.
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Janvier 2010